Des bactéries qui ne perdent pas le Nord
Le champ magnétique terrestre est présent tout autour de nous, il forme un bouclier protégeant la vie sur Terre. Si nous ne sommes pas en mesure de l’observer directement, certains organismes l’utilisent pour se déplacer comme les bactéries magnétotactiques.
Que sont les bactéries magnétotactiques ?
Les bactéries magnétotactiques ont été observées pour la première fois en 1963 et leur comportement a été décrit en 1975. On les retrouve principalement dans les sédiments aquatiques.
Ces bactéries présentent la capacité de se déplacer grâce aux champs magnétiques en utilisant un organite dédié, les magnétosomes, structures membraneuses agissant comme une boussole.
Cette propriété est connue sous le nom de magnétoréception, sens qui permet à un être vivant de détecter l'intensité et/ou l'orientation d'un champ magnétique.
Fonctionnement du magnétisme
Les magnétosomes sont composés de cristaux ferrimagnétiques. Ce sont des nano-aimants, parfois constitués de magnétite mais aussi de greigite, un autre matériau magnétique. Lorsque ces organites sont en chaîne, ils se comportent tels une boussole dans la cellule et permettent aux bactéries de percevoir et de s’aligner sur le champ magnétique terrestre.
La Terre produit un champ magnétique avec des lignes qui sortent au niveau du pôle Sud et rentrent au niveau du pôle Nord. Les bactéries qui sont au Nord se déplacent en suivant les lignes magnétiques tandis que celles du Sud nagent dans le sens contraire. En effet, l’alignement des magnétosomes avec le champ terrestre est un mécanisme passif non contrôlable par les bactéries à l’inverse de la nage qui est active. Cette perception du magnétisme n’explique donc pas entièrement le déplacement de ces microorganismes. Il a notamment été montré que les bactéries sont également en mesure de ressentir les concentrations en dioxygène de l’eau et de se déplacer en conséquence. Comme la plupart des organismes vivants, ce composé est nécessaire à leur survie.
Ainsi, la perception du magnétisme, combinée à d’autres capacités permet aux bactéries de se développer dans les environnements qui leur sont les plus favorables.
La R&D magnétotactique
Les bactéries magnétotactiques sont envisagées comme sources de nano-aimants pour la nanomédecine, bien que l’emploi de ce type de bactéries ne soient pas encore autorisé dans des applications destinées aux humains, alors qu’elles ne sont pas toxiques.
Des technologies similaires aux magnétosomes sont utilisées dans diverses applications telles que le traitement des cancers. Il s’agit d’hyperthermie. Des nanoparticules sont injectées aux patients et sont ensuite soumises à un champ magnétique alternatif. L’énergie magnétique est convertie en énergie thermique. L’augmentation de la température de quelques degrés (entre 4 et 9°C) entraîne la mort des cellules cancéreuses.
D’autres applications sont également envisagées. Pour faire écho à une ancienne brève sur la dépollution des eaux (23/09/22), les bactéries magnétotactiques pourraient être utilisées pour permettre de traiter les eaux polluées. Cette solution serait peu coûteuse et très efficace en permettant le retrait des métaux lourds et même d’éléments radioactifs.
En 2020, un projet a été initié par l’institut de biosciences et biotechnologies d’Aix-Marseille en partenariat avec l’Université Göttingen afin d’étudier la navigation de ce type de bactéries en milieu complexe. Il a d’ailleurs bénéficié d’une aide de l’ANR (Agence Nationale de Recherche). Les résultats de ces recherches pourront être utilisés dans l’élaboration de microrobots avec une parfaite maîtrise du micro-déplacement.
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