
L’application du droit de la concurrence aux fédérations professionnelles a été au cœur de l’actualité du droit de la concurrence des derniers mois. Les fédérations professionnelles font ainsi l’objet d’une vigilance croissante de la part des autorités de concurrence, dont témoignait déjà l’augmentation du plafond de sanction applicable par la directive ECN+.
Les contours de l’application du droit de la concurrence aux fédérations professionnelles
Les fédérations professionnelles sont des sujets à part entière du droit des pratiques anticoncurrentielles et peuvent donc à ce titre être condamnées sur le fondement des articles 101 et 102 TFUE.
Outre les cas où elles exercent elles-mêmes une activité économique, une série de leurs activités sont susceptibles de constituer des pratiques anticoncurrentielles lorsqu’elles coordonnent l’action de leurs membres ou conduisent à l’éviction injustifiée de certaines entreprises. Tel est ainsi le cas de l’édiction de règles d’adhésion, d’exclusion, de cotisation ou d’accès aux services discriminatoires, l’organisation de réunions entre entreprises, les actions de représentation des adhérents, la collecte, production et diffusion d’informations auprès du marché et les activités de normalisation.
Assurer la conformité des activités des organismes professionnels est d’autant plus important que la directive ECN+ de 2021 a renforcé la sévérité des sanctions applicables. Les associations peuvent désormais se voir infliger une amende allant jusqu’à 10% du chiffre d’affaires cumulé réalisé par ses membres sur le marché affecté par l’infraction. Si elle est insolvable, les autorités de concurrence peuvent exiger le paiement de l’amende de toute entreprise sont les représentants étaient membres des organes décisionnels voire, le cas échéant de toute entreprise membre qui était active sur le marché affecté, sauf si sa non-participation à l’infraction est établie. Le risque n’existe donc pas seulement pour les fédérations elles-mêmes, mais pour leurs membres également, d’où l’importance des récentes précisions de la jurisprudence relatives à l’engagement de leur responsabilité personnelle.
Les conditions de l’engagement de la responsabilité personnelle des membres des fédérations professionnelles
La question de la responsabilité personnelles des membres des fédérations professionnelles fait l’objet d’une actualité brûlante. À l’occasion d’une question préjudicielle posée par la Cour administrative suprême de Lituanie concernait la chambre nationale des notaires, la Cour de justice a en effet rappelé qu’une autorité nationale de concurrence ne peut engager la responsabilité des membres d’une association professionnelle sans établir leur qualité de co-auteur de l’infraction aux règles de concurrence.
La seule qualité de membre ne suffit donc pas à établir la responsabilité individuelle des entreprises. Pour ce faire, les autorités doivent établir leur participation à l’infraction en se fondant sur un faisceau d’indices. Il résulte ainsi d’une jurisprudence déjà bien établie que la participation à une réunion ayant un objet anticoncurrentiel peut suffire à engager la responsabilité de l’entreprise si elle ne s’en est pas publiquement distancée, dès lors qu’il est présumé qu’elle prend nécessairement en compte les informations échangées à cette occasion.
En revanche, l’Autorité de la concurrence a précisé à l’occasion de l’affaire BPA que la seule réception de comptes rendus de réunion, même si leur contenu est très explicite, ne peut suffire, en l’absence d’autres indices, à caractériser l’adhésion de l’entreprise à la pratique et donc marquer le point de départ de sa participation à l’infraction en cause. Il n’est en revanche pas exclu que la réception de tels comptes rendus suffise à établir que l’entreprise a continué à participer à une infraction à laquelle son adhésion avait été établie par des éléments antérieurs.
Quels outils pour construire ou renforcer le dispositif de conformité des fédérations professionnelles aux règles de concurrence
L’équipe EU & Concurrence de Fidal a mis en place une démarche structurée pour créer ou renforcer le dispositif de conformité des associations et fédérations professionnelles. Cette démarche repose sur
- une grille d’analyse qui distingue
- les risques statiques de concurrence (structuration de l’association)
- les risques dynamiques de concurrence (activités de l’association)
- une collecte d’information et de documents
- une évaluation notée des différents risques
- une suggestion de plan d’actions en fonction de la criticité des risques identifiés.
- Formuler des recommandations afin, le cas échéant, de renforcer ces procédures, à la lumière des recommandations du document-cadre de l’Autorité du 24 mai 2022 sur les programmes de conformité aux règles de concurrence ;
- Etablir des fiches pratiques sur les bons comportements à adopter dans le cadre des activités de la fédération, en décrivant séparément le modus operandi d’une part pour la fédération et d’autre part pour ses adhérents et en tenant compte des éléments existants (ex. Lignes directrices sur les statistiques) ;
- Le cas échéant, présenter aux adhérents le programme de conformité ainsi complété
Le résultat de ces analyse permet les actions suivantes :
- Formuler des recommandations afin, le cas échéant, de renforcer ces procédures, à la lumière des recommandations du document-cadre de l’Autorité du 24 mai 2022 sur les programmes de conformité aux règles de concurrence ;
- Etablir des fiches pratiques sur les bons comportements à adopter dans le cadre des activités de la fédération, en décrivant séparément le modus operandi d’une part pour la fédération et d’autre part pour ses adhérents et en tenant compte des éléments existants (ex. Lignes directrices sur les statistiques) ;
- Le cas échéant, présenter aux adhérents le programme de conformité ainsi complété
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