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Mécénat d’entreprise & Prêt de main-d’œuvre : la proposition de Fidal va porter ses fruits

01 mars 2018
par Stéphane Couchoux,
Nicolas François

Dans notre étude prospective « Mécénat et Fondations en France : un nouveau souffle » publiée en octobre 2017, nous attirions l’attention du législateur (cf « Proposition n° 20 ») sur les risques juridiques liés à une opération de mécénat en nature portant sur un prêt de main-d’œuvre de salariés d’une entreprise au bénéfice d’un organisme d’intérêt général au regard des dispositions en vigueur du Code du travail et ce, malgré une doctrine fiscale favorable à ce type d’opération.

Heureuse nouvelle : l’insécurité juridique est sur le point d’être enfin levée par le législateur !

Le mécénat portant sur le prêt de main-d’œuvre de salariés d’une entreprise au bénéfice d’un organisme d’intérêt général pourra donc intervenir dans un cadre sécurisé au plan juridique et optimisé au plan fiscal. Explications :

  1. Le prêt de main d’œuvre devait revêtir un « caractère non lucratif » … ce qui excluait les opérations réalisées à titre gratuit (mécénat)

Le prêt de main-d’œuvre se définit comme une opération ayant pour objet exclusif la mise à disposition de personnel d’une entité à une autre.

L’entreprise peut mettre ses salariés à la disposition de la structure bénéficiaire qui se voit transférer, dans certaines limites, la direction et le contrôle des salariés. L’employeur ne contracte aucune obligation envers l’organisme bénéficiaire autre que la simple mise à disposition du personnel en cause. L’opération porte donc exclusivement sur le travail d’autrui et ce prêt doit revêtir un caractère non lucratif (article L8241-1 du Code du travail, issu de l’article 40 de la loi du 28 juillet 2011 dite loi « Cherpion »), les opérations de mise à disposition de personnel à but lucratif n’étant autorisées que pour les entreprises de travail intérimaire. Dans le cas contraire, le prêt de main-d’œuvre sera considéré comme illicite (avec à la clé des sanctions juridiques et pénales).

Dans ce contexte, la Cour de cassation a rappelé sa position selon laquelle le caractère lucratif est caractérisé par la recherche d’un gain pécuniaire par le fournisseur de la main-d’œuvre ou par le bénéficiaire (Cass. crim., 20 mars 2007, n° 05-85.253). En effet, il existe un but lucratif si l’utilisateur ne rembourse aucune charge au fournisseur ou si les salaires, charges et frais de gestion remboursés sont moindres que ce qu’il aurait du verser si les salariés avaient été les siens.

Dès lors, la gratuité inhérente à une opération de prêt de main-d’œuvre dans le cadre du mécénat en nature revêtait un but lucratif au sens des textes et de la jurisprudence précités et donc un risque au plan social.

Cette situation choquante nous paraissant insuffisamment sécurisée pour les entreprises souhaitant associer leurs salariés à une opération de mécénat, souvent en lien avec leur politique « RSE »,  nous soulevions pour cette nécessité de sécurisation dans la Proposition n°20 de notre étude prospective citée plus avant.

2.  Vers la sécurisation juridique du prêt de main-d’œuvre dans le cadre du  mécénat d’entreprise

Dans un premier temps, l'ordonnance "Macron" 2017-1387 du 22 septembre 2017 a créé un dispositif visant à faciliter le prêt de main-d'œuvre entre un groupe ou une entreprise et une jeune entreprise ou une PME en créant pour la première fois une exception au principe de non lucrativité (serait considérée comme dépourvue de but lucratif, même lorsque le montant facturé par l’entreprise prêteuse à l’entreprise utilisatrice est inférieur aux salaires versés aux salariés, aux charges sociales et aux frais professionnels réellement couverts.).

Or, dans un second temps, après avoir complété le texte, le législateur dans l'article 6-I-9° du projet de loi de ratification des diverses ordonnances dites « Macron » a explicitement étendu cette exception aux associations et fondations.

La définition des entreprises utilisatrices entrant dans le champ du prêt de main-d'œuvre spécifique prévu par l'article L 8241-3 du Code du travail est en effet étendue aux personnes morales dont la liste est fixée aux a à g de l'article 238 bis, 1 du CGI (dispositif « Mécénat d’entreprise »). Sont ainsi visés des établissements et associations pouvant bénéficier d'un mécénat d'entreprise ouvrant droit à la réduction d'impôt sur les bénéfices au taux de 60%.

Par ailleurs, contrairement aux entreprises du secteur marchand, aucune condition liée à l'ancienneté de l’entité utilisatrice ou à son effectif n'est prévue.

Le nouveau cadre du prêt de main-d'œuvre précise désormais que :

  • ce n’est que pour les entreprises utilisatrices que ces opérations n'ont pas de but lucratif au sens de de l'article L 8241-1 ;
  • ce caractère non lucratif est également reconnu lorsque le montant facturé par l'entreprise prêteuse à l’entité bénéficiaire de prêt de main-d’œuvre est égal à zéro (hypothèse du mécénat d’entreprise en nature).

Ces dispositions entreront en vigueur le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel.

Cette évolution confirme la pertinence de l’analyse faite par le secteur « Fondations, Mécénat & Entreprises » de Fidal depuis de nombreuses années et le besoin de réforme des textes qui avait été formulé.

Attention : cette nouvelle ouverture ne doit pas faire oublier que le prêt de main-d’œuvre nécessite la conclusion d’une convention entre l’entreprise prêteuse et l'organisme bénéficiaire ainsi qu’un avenant au contrat de travail signé par le salarié à des conditions très précises afin de garantir la régularité et la licéité de l’opération. 

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