Le rendez-vous de l'innovation #60
Huîtres et intoxication : qui sont les responsables ?
Elles sont souvent accusées d’être coupables de toxi-infections alimentaires durant la période des fêtes de fin d’année. Pourtant, les huîtres sont des aliments sains, particulièrement surveillés en France. Mais alors quelles sont les causes de ces contaminations et qu’est-il fait pour remédier à cela ?
- Huîtres et TIAC
En France, l’ostréiculture regroupe plus de 2000 entreprises produisant plus de 90 000 tonnes d’huîtres chaque année. La période des fêtes de fin d’année est propice à la vente d’huître. En effet, 40% des ventes annuelles d’huîtres sont réalisées sur la seule période de Noël. Quelque fois, des toxi infections alimentaires collectives provoquées par les huîtres sont recensées. Une TIAC est définie par l’apparition d’au moins 2 cas de maladies avec une symptomatologie similaire, en général gastro-intestinale, dont on peut rapporter la cause à un même aliment ou repas. Pour ce qui concerne celles liées aux huîtres, les norovirus sont le plus souvent impliqués. Le genre Norovirus appartient à la famille des Caliciviridae. Ces petits virus ronds, non enveloppés, possèdent un génome à ARN. Ils présentent une grande diversité génétique avec une absence de protection croisée, c’est-à-dire que l'immunité contre une souche de norovirus ne protège pas des autres. Du fait de sa physiologie, l’huître concentre les virus dans ses tissus digestifs où, bien qu’ils ne puissent pas se multiplier, ils peuvent persister un à deux mois en se liant à des ligands spécifiques. La quantité de toxi-infection liées à la consommation des huîtres est variable d’une année à l’autre. Par exemple, l’hiver 2019 a été particulièrement marqué par un nombre exceptionnellement élevé de TIAC durant les fêtes de fin d’année. Ainsi, 141 TIAC associées à la consommation d’huîtres ont été notifiés sur le seul mois de décembre 2019.
- Les huîtres sont-elles réellement responsables ?
Et bien non… Le responsable de la contamination des huîtres au norovirus est tout simplement l’Homme. En effet, ce virus, agent majeur de gastro-entérites fréquemment incriminé dans les épidémies liées à la consommation de coquillages contaminés, est issu des fèces humains. La contamination des huîtres est donc liée à plusieurs facteurs tels qu’un rejet important de ces microorganismes pendant la période hivernale, leur résistance élevée dans l’environnement, les capacités de filtration des mollusques bivalves et la présence de ligands spécifiquement reconnus par les norovirus dans les tissus digestifs des huîtres. Les évènements impliqués dans la contamination de ces coquillages sont divers : déversement d’eaux usées accidentel, pluies importantes ou rejets directs de virus.
- Et la R&D dans tout ça ?
L’objectif de la R&D dans cette problématique est multiple. Dans un premier temps elle doit prévenir les risques de contamination dans un souci de protection des consommateurs. Pour cela le développement de techniques de détection et de caractérisation des virus a fait un grand pas en avant durant ces dernières années. Elles permettent de suivre l’évolution génétique des virus entériques et ainsi anticiper leur propagation et effectuer un contrôle ciblé des zones de production. Mais les travaux de R&D ont également un rôle important dans le suivi d’autres facteurs inhérents à la production ostréicole tels que les paramètres épidémiologiques, climatiques et environnementaux. Ainsi, la science, en lien direct avec la protection des consommateurs, permet de mettre en exergue l’implication des effets de l’Homme sur la biodiversité.
La réglementation française pour la sécurité alimentaire résulte de travaux transverses impliquant les acteurs de la recherche et du monde de l’agro-alimentaire. Les études visent à améliorer les outils de diagnostic et réaliser un suivi le plus précis possible des sources d’intoxication. Cependant, le cas de l’huître met en avant le fait que l’activité de l’Homme affecte directement la nature et indirectement sa propre santé.
