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LES AVOCATS DU DÉPARTEMENT DROIT DU PATRIMOINE PARTAGENT LEUR EXPÉRIENCE AVEC VOUS - EPISODE 2

December 17, 2020
by Sophie Chupin

Episode 2 : Organiser la transmission de ses titres sociaux par testament : attention au régime matrimonial !

" Nous avons été contactés par Isabelle et Caroline, deux sœurs qui partagent une passion commune pour la mode. En 2003, elles ont constitué la SAS IC dont chacune détient 20 000 actions depuis l’origine. En raison de l’expansion de leur activité, Isabelle et Caroline envisagent de procéder à plusieurs augmentations de capital :

  • L’une destinée à ouvrir le capital à des investisseurs extérieurs ;
  • dans le même temps, elles prévoient de réaliser un apport en numéraire afin de recevoir en contrepartie respectivement chacune 10 000 actions nouvelles, assorties d’une prime d’émission ;
  • par la suite, ces primes d’émission pourraient être incorporées au capital.

Elles nous ont par ailleurs fait part des mésententes existant entre Isabelle et l’époux de Caroline, Paul, avec lequel cette dernière est mariée sous le régime légal de la communauté d’acquêts depuis 2006.
Caroline, soucieuse d’éviter tout blocage au sein de la société si elle décédait avant sa sœur qu’elle désire protéger avant tout, a légué tous les droits qu’elle détient sur ses actions à cette dernière par testament. Ces dispositions testamentaires suffisent-elles à préserver Isabelle de l’immixtion de son beau-frère dans la société au décès de Caroline ?
 "

Le testament ne règle la transmission que des biens compris dans la succession de Caroline, laquelle se composera des biens propres de la défunte et de la moitié des biens communs. L’autre moitié des biens communs reviendra à Paul par le seul effet du régime matrimonial. Il est donc impératif de déterminer la nature, propre ou commune, des actions de Caroline :

Origine des actions

Nature des actions

Efficacité du testament

20 000 actions souscrites en 2000

Propres pour avoir été acquises avant le mariage 

Oui

10 000 actions reçues en contrepartie de l’apport numéraire

Communes car, par principe, les biens acquis au cours du mariage dépendent de la communauté car ils sont présumés avoir été financés par des deniers communs

Non

Les éventuelles actions issues de l’augmentation de capital par incorporation de la prime d’émission

Propres pour les deux-tiers et, communes pour un tiers : la qualification de ces actions suit le sort des titres préexistants, par une sorte de mécanisme d’accessoire

Non

En conclusion, le testament rédigé par Caroline n’est pas totalement efficace puisque le tiers des actions de la SAS IC détenues par Caroline dépendront de la communauté : Paul aura droit à la moitié de cette masse commune et pourra, à ce titre, participer à la vie de la société.

Pour éviter une situation de blocage de la société liée au désaccord existant entre Paul et Isabelle, plusieurs solutions sont envisageables :

  1. Réaliser l’apport en numéraire au moyen de fonds propres (provenant d’une donation ou d’une succession) : les actions reçues en contrepartie demeureront propres à Caroline sous réserve de remplir les formalités de remploi.
  2. Insérer une clause d’agrément spéciale dans les statuts de la SAS IC pour filtrer l’entrée de nouveaux associés : Isabelle pourra ainsi refuser l’agrément de Paul qui sera indemnisé par la société de la valeur de ses droits.
  3. Aménager le régime matrimonial et prévoir que les actions de la SAS IC resteront propres à Caroline, quelles que soient les modalités de financement. Attention toutefois, si Caroline utilise des fonds communs pour réaliser l’apport en numéraire, elle devra verser une indemnité à son époux lors de la liquidation de leur régime matrimonial, sauf disposition contraire insérée dans leur convention matrimoniale.

En toute hypothèse, nous avons conseillé à Caroline de compléter son testament et de prévoir, comme le permet l’article 1015 du Code civil, que les dividendes attachés aux actions tombées dans sa succession reviendront, dès son décès, à Isabelle. A défaut, elle ne pourrait pas y prétendre avant d’avoir formellement demandé la délivrance de son legs aux héritiers de Caroline (Cass. 1re civ., 2 sept. 2020, n° 19-14.604 : JurisData n° 2020-012468).

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