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AT-MP : OBLIGATION D’INFORMATION DE LA CPAM - ACTUALITE JURISPRUDENTIELLE

June 08, 2018
by William Ivernel

Avant de prendre une décision de reconnaissance du caractère professionnel d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, la CPAM doit assurer l’information de l’employeur, en lui adressant, à la fin de l’instruction qu’elle a menée, une lettre l’invitant à prendre connaissance des éléments du dossier qu’elle a constitué.

Cette application du principe du contradictoire s’explique par le fait que l’employeur sera, en cas de reconnaissance, le payeur final des prestations versées par la CPAM au salarié, au travers du système de tarification des AT-MP.

La Cour de cassation a eu l’occasion de rendre quelques arrêts depuis le début de l’année 2018 qui tranchent un certain nombre de points quant aux modalités pratiques de consultation du dossier par l’employeur.

  1. Quels sont les éléments qui doivent être mis à disposition de l’employeur ?

    En vertu de l’article R 441-14 du Code de la sécurité sociale, quand la caisse a procédé à une enquête, elle « communique à la victime ou à ses ayant-droits et à l’employeur au moins dix jours avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d’en déterminer la date de réception, l’information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier… ».

    Le dossier constitué par la caisse doit comprendre les éléments qui sont énoncés par l’article R 441-13 (la DAT, les divers certificats médicaux détenus par la caisse, les constats faits par la caisse, les informations parvenues à la caisse de chacune des parties, les éléments communiqués par la caisse régionale).

    L’arrêt en date du 15 février 2018 (n° 17-10.211 non publié), rappelle que la caisse doit tenir à la disposition de l’employeur le questionnaire auquel avait répondu la victime et l’avis du médecin conseil (rappelons que celui-ci n’a pas à être motivé, ni même signé !) (Cass. 2ème civ., 28 mai 2009, n° 08-18426, publié).

    Toutefois, cet arrêt précise que si l’un des éléments recueillis par la caisse est transmis à l’employeur postérieurement au délai qui lui a été imparti pour présenter ses observations, l’inopposabilité de la décision de prise en charge doit être prononcée.

    L’employeur peut-il obtenir la remise d’une copie du dossier de la CPAM ?

    C’est ce que soutenait un employeur auquel la CPAM avait refusé la communication (dématérialisée ou au format papier) au moment de la consultation du dossier dans les locaux de la caisse.

    Par arrêt en date du 4 avril 2018 (n° 17-14.176 non publié), la Cour de cassation vient toutefois préciser que la caisse n’est pas tenue de procéder à « la remise effective d’une copie du dossier ».

    Une telle position est particulièrement stricte, quand on connaît les difficultés pour accéder au dossier auprès d’un certain nombre de caisses, qui exigent parfois une prise de rendez-vous. Elle l’est encore plus dans l’hypothèse où l’employeur est géographiquement éloigné du siège de la caisse.

    Heureusement, certaines caisses font preuve de compréhension et acceptent d’adresser à l’employeur le dossier par voie postale, voire par mail (rien ne les y oblige : Cass. Civ. 2ème 5 avril 2007 n° 06-13.663).

    A l’heure de la dématérialisation des échanges, on doit souhaiter que l’accès au dossier de la CPAM puisse rapidement être réalisé via une plateforme sécurisée accessible à l’employeur.

  2. De quel délai dispose l’employeur pour consulter le dossier ?

    En vertu de l’article R 441-14 du CSS, la caisse doit laisser à l’employeur un délai d’au moins dix jours francs pour consulter le dossier, avant de prendre sa décision.

    Mais dans l’hypothèse où la caisse a accepté d’adresser le dossier à l’employeur par voie postale, ce délai de dix jours francs court-il à compter de la réception dudit dossier ?

    C’est ce que soutenait un employeur.

    Par arrêts en date du 15 mars 2018 (n° 16-28.333 et 17-10.640 publié), la Cour de cassation a approuvé une Cour d’appel qui avait jugé que le délai de dix jours courait à compter de la date de réception par l’employeur du courrier de clôture de l’instruction, peu important l’envoi d’une copie du dossier à l’employeur.

    Cette position conduit les employeurs à privilégier une consultation du dossier dans les locaux de la caisse, s’ils ne veulent pas être tributaires des délais d’acheminements postaux et pouvoir faire des observations avant la prise de décision de la caisse.

  3. Quel calendrier la caisse doit-elle respecter lorsqu’un dossier de maladie professionnelle est communiqué au Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles ?

    On rappellera que le Comité Régional (CRRMP) est saisi lorsque l’une des conditions d’un tableau de maladie professionnelle fait défaut ou lorsque la maladie n’est pas répertoriée par un des tableaux.

    Dans cette hypothèse, il a déjà été jugé que la caisse devait assurer l’information de l’employeur préalablement à la saisine du Comité : Civ. 2ème 23 janvier 2014 n° 12-29420 publié. Le dossier constitué par la Caisse doit alors comprendre notamment l’avis du médecin du travail (Cass. Civ.2, 23 janvier 2014, 12-29.420, Publié).

    Néanmoins, certaines caisses ont pour pratique d’adresser le courrier de clôture d’instruction à l’employeur tout en transmettant concomitamment au CRRMP le dossier constitué.

    Dans ces conditions, un employeur faisait valoir qu’il n’avait pas disposé du temps nécessaire pour faire connaître ses observations.

    En réponse à cela, la CPAM de la Marne considérait que, dès lors que la décision du CRRMP était intervenue trois mois après, l’employeur avait disposé d’un délai suffisant pour faire connaitre ses observations. La Cour d’appel de REIMS avait suivi cette position.

    Cet arrêt est cassé, la haute juridiction considérant que la caisse n’avait pas permis à l’employeur de faire connaître ses observations au Comité Régional, préalablement à la transmission du dossier.

    (Cass. civ. 2ème 25/01/2018, n° 17-10.994).

    Déjà en ce sens : cass. civ. 2ème, 31 mars 2016, 14-30.015, publié et Civ. 2ème, 15 mars 2012, 10-26.221, Publié au bulletin

En synthèse de l’ensemble de ces décisions, il peut être constaté que les modalités de consultation du dossier de la CPAM au terme de l’instruction peuvent être rendues assez délicates voire subtiles.

Dans le cadre de l’optimisation de ses process, l’employeur a donc tout intérêt à favoriser une consultation dans les locaux de la CPAM, ce d’autant plus qu’il pourra difficilement se prévaloir du caractère incomplet du dossier si la Caisse a accepté de le lui adresser (Cass.civ. 2ème 13 février 2014 n° 13-11.569).

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