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Juliette Robin Vernay Avocate Directrice Associée
Mathilde Ponchel Avocate Associée
Parole d'expert
18 avril 2024

Marque et nom patronymique (volet 1)

L'utilisation du nom patronymique dans le monde des affaires est une pratique courante, illustrée par des marques emblématiques telles que Louis Vuitton, Gucci ou encore McDonald's.

Cette tendance reflète souvent une volonté de mettre en avant un savoir-faire ou un héritage familial, associant le nom de famille à un certain prestige. Toutefois, cette démarche n'est pas sans contrainte en matière de propriété intellectuelle. L'exemple des frères McDonald, fondateurs de l'empire éponyme du fast-food, illustre les défis et les implications juridiques et commerciales liés à l'utilisation d'un nom patronymique dans le cadre des affaires.

Choisir de nommer sa société ou sa marque par son nom patronymique entraine un certain nombre de conséquences, à la fois pour le titulaire mais également pour sa descendance. Le code de la propriété intellectuelle s’est penché sur la question, et la jurisprudence abondante sur le sujet, relate des conflits juridiques sur fond de désaccords familiaux qui sont assez délicats à appréhender.

I.    Déposer un nom patronymique à titre de marque

A titre liminaire, il convient de rappeler qu’il est tout à fait possible de déposer son nom patronymique à titre de marque (1). Ainsi, bien que le nom patronymique soit, par principe, considéré comme un droit de la personnalité inaliénable et imprescriptible, la législation ne l'interdit pas, tant qu'il répond aux critères de distinctivité exigés par la loi en la matière.

Il convient ainsi de distinguer deux hypothèses : la première où le titulaire du nom patronymique n'est pas le déposant de la marque reprenant ce nom, et la seconde où le titulaire du nom de famille est également le déposant de la marque.

  • Le déposant n’est pas le titulaire du nom patronymique 

Toute personne est libre de déposer un nom patronymique en tant que marque. Toutefois, la jurisprudence est particulièrement attentive à ce que le dépôt de marque ne porte pas atteinte aux titulaires du nom patronymique. 

L’article L711-3 du Code de la propriété intellectuelle prévoit que le nom patronymique constitue une antériorité opposable à une marque postérieure. 

« I.-Ne peut être valablement enregistrée et, si elle est enregistrée, est susceptible d'être déclarée nulle une marque portant atteinte à des droits antérieurs ayant effet en France, notamment :

(…) 8° Un droit de la personnalité d'un tiers, notamment à son nom de famille, à son pseudonyme ou à son image ; »

En conséquence, les porteurs de ce nom peuvent en théorie agir en annulation de la marque, si celle-ci porte atteinte à leur droit au nom (2). 

C’est d’ailleurs sur cette base que la Cour de Cassation a confirmé l’annulation de plusieurs marques « Eiffel ». 
En effet, les juges ont déduit que le consommateur d’attention moyenne confronté à ces marques ne pourrait pas distinguer si les produits ou services proposés sous les marques composées du nom « Eiffel » proviendraient ou non d’un descendant de Gustave Eiffel (3). 

Récemment, le Tribunal de l'Union européenne a annulé la marque NEYMAR, déposée de mauvaise foi par un homme d'affaires pour divers articles de mode, en raison de la notoriété préexistante du joueur de football Neymar (4). 

L’ancien Tribunal de Grande instance de Paris avait déjà tenu une position similaire dans une affaire ou un déposant avait enregistré la marque STALLONE. Le tribunal avait statué qu’ :

« est nulle une marque constituée du nom patronymique d’un tiers, personne célèbre. (…) Le nom patronymique est indisponible pour constituer une marque ou tout autre signe distinctif lorsqu’il est notoire et qu’il existe, de ce fait, un risque de confusion entre le titulaire du nom et le déposant de la marque » (5).

L’on remarque cependant, que ces décisions d’annulation ont concerné à chaque fois des noms patronymiques célèbres. Or dans le cas d’un nom patronymique qui ne ferait pas référence à une célébrité, la jurisprudence estime généralement qu'en l'absence d'association entre le nom de famille et la marque, aucun préjudice n'est subi par le titulaire (6). 

  • Le déposant de la marque est la personne physique dotée du nom patronymique 

La personne physique porteuse du nom patronymique peut naturellement enregistrer son nom de famille à titre de marque, de dénomination sociale ou encore d’enseigne. 

Dans une affaire singulière, la cour de cassation expose que le déposant a obtenu le droit, par décret préalable, d'adjoindre le patronyme EIFFEL au sien : il était donc bien porteur du nom de famille.
Néanmoins, la Cour de Cassation a confirmé l’annulation de plusieurs marques « Eiffel ». 
En effet, les juges ont déduit que le consommateur d’attention moyenne confronté à ces marques ne pourrait pas distinguer si les produits ou services proposés sous les marques composées du nom « Eiffel » proviendraient ou non d’un descendant de Gustave Eiffel (7). 

L’article L713-6 du Code de la propriété intellectuelle autorise également les homonymes de bonne foi à exploiter leur patronyme au sein d’une dénomination sociale, d’un nom commercial ou d’une enseigne. 

« I. - Une marque ne permet pas à son titulaire d'interdire à un tiers l'usage, dans la vie des affaires, conformément aux usages loyaux du commerce :

 1° De son nom de famille ou de son adresse lorsque ce tiers est une personne physique ; »

Toutefois, l’exception d’homonymie fait naitre quelques complexités dans la vie des affaires. En effet, il arrive que des marques, incorporant des patronymes similaires voire identiques, soient amenées à coexister, ce qui ôte sensiblement l’intérêt de la marque, dont l’une des fonctions majeures est de garantir un monopole sur un signe. 

Dans l’Affaire « HENRIOT », la Cour de cassation a ainsi invité les champagnes HENRIOT, SERGE HENRIOT et RAYMOND HENRIOT à coexister (8). Pour appuyer sa décision, la Cour de cassation a relevé l’utilisation de bonne foi dans l’activité de producteur-récoltant et négociant en vins des différents individus porteurs du nom patronymique. Dans cette affaire, la Cour d’Appel avait également relevé la fréquence des homonymies en Champagne viticole. 

Dans une autre affaire de 2022, la Cour de cassation a affirmé le principe selon lequel l'utilisation d'un nom de famille à des fins commerciales peut être légitime, même si ce nom est également celui d'une marque renommée (9).

L'affaire opposait Virginie Taittinger, ancienne employée et associée de la Maison de champagne Taittinger, à cette dernière, qui contestait l'utilisation de son nom de famille dans la production de champagne. Les juges ont statué en faveur de Virginie Taittinger, estimant qu'elle avait des raisons légitimes d'utiliser son patronyme et qu'elle respectait les usages commerciaux honnêtes, notamment dans la mesure où, bien qu’étant engagée à ne pas faire usage de la dénomination TAITTINGER à titre de marque, elle exploitait sans ambiguïté son nom patronymique associé à son prénom dans le cadre de sa propre activité pour informer de son origine familiale et de son parcours professionnel. La Cour de cassation a donc confirmé cette décision, soulignant que l'usage du nom Taittinger avait une dimension familiale et mettait en avant l'expertise de Virginie Taittinger dans l'industrie du champagne.

Ainsi, la bonne foi de la personne physique faisant usage du nom patronymique identique ou similaire à une marque précédemment enregistrée est caractérisée dès lors que le déposant n’a pas commis d’actes fautifs (10). 

Au contraire, l’exception d’homonymie ne peut s’appliquer en cas de mauvaise foi du déposant et titulaire du patronyme et de risque de confusion dans l’esprit du consommateur entre les signes concernés. 

Les juges ont pu décider que le porteur d’un patronyme ne peut le déposer à titre de marque si ce patronyme est déjà déposé et qu’il profite d’une notoriété rattachée à des produits et services (11). En l’espèce, le fait pour le porteur du patronyme d’usurper la notoriété attachée aux barons de Rothschild crée un risque de confusion avec les marques antérieures déposées par les Consorts de Rothschild. La mauvaise foi a donc été retenue par les juges du fond. 

Mais parfois, la bonne foi du déposant n’est quand même pas suffisante. C’est en ce sens que le présentateur d’émissions de télévision Stéphane PLAZA s’est vu refuser l’enregistrement de sa marque verbale « Plaza Immobilier (12) »  du fait de l’existence d’une dénomination sociale antérieure Plaza Immobilier. Cette solution découle toutefois de la constatation que le terme PLAZA apparaît comme un nom commun courant dans le domaine immobilier pour désigner une « place ». Or, le patronyme n’ayant pas acquis une renommée lors du début de l’exploitation, par la société tierce, du patronyme litigieux, cette dernière pouvait légitimement l’exploiter pour son activité.

 

II.    L’utilisation du nom patronymique dans la vie des affaires 

Si par principe le nom patronymique est considéré comme un droit de la personnalité inaliénable et imprescriptible, son usage dans la vie des affaires peut le transformer en véritable élément du fonds de commerce. 

 

  • Le nom patronymique : un élément incorporel du fonds de commerce

Le nom patronymique peut faire l’objet d’une convention dans la vie des affaires. Il se détache ainsi de la personne physique pour devenir un véritable bien incorporel, un instrument de ralliement de la clientèle.

Il est intéressant de noter que le nom patronymique qui fait l’objet d’une marque constitue donc une antériorité opposable erga omnes, y compris aux porteurs de ce nom patronymiques (13).

Dans l’affaire « Bordas », rendue le 12 mars 1985, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a ainsi affirmé que :

« le principe de l’inaliénabilité et de l’imprescriptibilité du nom patronymique, qui empêche son titulaire d’en disposer librement pour identifier au même titre une autre personne physique, ne s’oppose pas à la conclusion d’un accord portant sur l’utilisation de ce nom comme dénomination sociale ou nom commercial » (14)

Ainsi, il n’est pas possible pour le titulaire du nom patronymique, qui aurait autorisé le dépôt de son nom de révoquer son consentement. 

Dans l'affaire "Ines de la Fressange", la marque a été régulièrement cédée à la société et a été intégrée à son patrimoine, de sorte que cette dernière a pu invoquer la garantie d’éviction pour rejeter la demande du célèbre mannequin, qui souhaitait récupérer la jouissance de son nom (15). 

Il reste cependant nécessaire de démontrer que c’est bien avec l’accord du titulaire du nom patronymique que la marque a été déposée au nom de la société. Telle était la problématique soulevée dans une affaire concernant le nom patronymique DUCASSE, rendue le 6 mai 2003 par la chambre commerciale de la Cour de cassation, relevant que le :

« consentement donné par un associé fondateur, dont le nom est notoirement connu, à l'insertion de son patronyme dans la dénomination d'une société exerçant son activité dans le même domaine, ne saurait, sans accord de sa part et en l'absence de renonciation expresse ou tacite à ses droits patrimoniaux, autoriser la société à déposer ce patronyme à titre de marque pour désigner les mêmes produits ou services ». 

Ainsi, comme toute convention de cession, les règles générales du droit des obligations s’appliquent. 

  • Acquérir une marque patronymique

L’on constate que les conflits naissent : 

  -      soit lorsque l’un des descendants souhaite lancer sa propre affaire sous son nom patronymique. Dans ce cas, c’est la bonne foi de l’entrepreneur, la notoriété du nom patronymique ainsi que l’activité projetée, qui vont être les éléments déterminants à analyser, pour évaluer la faisabilité d’un tel projet. 

  -    soit lorsque l’entreprise qui porte le nom patronymique fait l’objet d’une cession à un tiers. 

Le conflit éclate généralement entre le cédant, qui souhaite poursuivre une activité sous son nom et le cessionnaire qui souhaite pouvoir jouir librement et paisiblement de l’actif qu’il a acquis. 

Dans le cas de la marque « Ines de La Fressange » précitée, c’est sur le fondement de la garantie d’éviction que l’entreprise avait pu obtenir gain de cause et conserver la jouissance paisible de la marque.  

Plus récemment, la personne physique porteur du patronyme, dont la marque éponyme avait été cédée, a invoqué à l’encontre de son acheteur la déchéance pour tromperie de la marque patronymique, au motif que le titulaire n’était plus dans la société. En l’occurrence il s’agissait de la marque ELISABETH EMMANUEL (patronyme du couturier fondateur de la marque).

La Cour de Justice de l’Union européenne s’est rangée du côté de l’acquéreur en décidant « qu’une marque correspondant au nom du créateur et premier fabricant des produits portant cette marque ne peut, en raison de cette seule particularité, être refusée à l'enregistrement au motif qu'elle induirait le public en erreur (16)»   et qu’il appartient au Juge d'examiner si, « dans la présentation de la marque ELIZABETH EMMANUEL, il n'existe pas une volonté de l'entreprise ayant introduit la demande d'enregistrement de celle-ci de faire croire au consommateur que Mme Emanuel est toujours la créatrice des produits portant ladite marque ou qu'elle participe à leur création ».

Jusqu’ici, l’on peut donc considérer que le courant jurisprudentiel était plutôt favorable aux acquéreurs de marques patronymiques. 

Mais tout récemment, une affaire portée devant la Cour de cassation a soulevé une nouvelle problématique à l’occasion d’une demande reconventionnelle formée par Jean-Charles de Castelbajac en déchéance d’une marque détenue par une société tierce à laquelle il était reproché de faire un usage trompeur auprès du public. La CJUE devra prochainement trancher le point de savoir si l’usage par un tiers d’une marque patronymique qui laisserait entendre que la personne physique participe toujours à l’activité constitue effectivement un motif de déchéance pour usage trompeur (17).

La garantie d’éviction pourrait ne plus être le rempart infaillible contre une action engagée par le titulaire du nom patronymique, si le cessionnaire a commis une faute. 

Quelles précautions en pratique quand on est confronté à une marque patronymique ?

En tant que déposant, si ce n’est pas mon propre nom,  il est impératif de vérifier les marques déjà déposées pour vérifier que la marque n’enfreint pas les droits d’un tiers

En tant que déposant, si c’est mon propre nom patronymique  : 

  -      je ne suis pas dispensé d’effectuer des recherches d’antériorités même si je suis déjà connu dans mon domaine. En effet, comme on a pu le voir précédemment, le nom patronymique ne donne aucune priorité, ni aucune immunité par rapport aux droits de propriété intellectuelle ;

  -      mon nom est-il notoirement connu dans un secteur d’activités ? La nature des relations familiales au moment du dépôt aura une importance majeure sur les risques éventuels de conflit. Bien entendu, un écrit confirmant tout accord ou autorisation sera le bienvenu, car les litiges peuvent surgir sur plusieurs générations ;

  -      en tant que vendeur ou acquéreur d’une entreprise ou d’un fonds de commerce portant une marque patronymique, l’on ne peut que recommander une extrême vigilance sur les conditions de la cession. Au regard de la jurisprudence en vigueur, il faudra particulièrement étayer les intentions des parties pour anticiper les mauvaises surprises. 
 

Annexes : 

(1) L’article L711-1 du Code de la Propriété intellectuelle permet de déposer tout signe en tant que marque, à condition d’être distinctif pour les produits ou services concernés.

(2) Cour de cassation, Chambre commerciale économique et financière, 16 Février 2022 – n° 19-20.562

(3) Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 janvier 2022, 19-10.949, Affaire Eiffel : Les juges ont annulé les marques litigieuses considérant que le consommateur serait amené à croire que l’ensemble des héritiers profiteraient de la marque déposée.

(4) TUE 14 mai 2019, Affaire n° T795/17, NEYMAR

(5) TGI Paris, 29 juin 1988, Stallone

(6) Pour illustration : CA Paris, 4ème ch., sect. A, 1er mars 2006, n° 05/02210 - Affaire « Sango», Cass. civ. 1, 10 avril 2013, n° 12-14.525, F-P+B+I - Affaire «Froment-Meurice », CA Paris, Pôle 5, 1ère ch., 1er décembre 2015

(7) Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 janvier 2022, 19-10.949, Affaire Eiffel : Les juges ont annulé les marques litigieuses considérant que le consommateur serait amené à croire que l’ensemble des héritiers profiteraient de la marque déposée.

(8) Cour d’appel de Paris, 2 juin 2010 n°08/20561, Arrêt « Henriot » : « Il résulte de l'article L. 713-6 du code de la propriété intellectuelle que l'enregistrement d'une marque ne fait pas obstacle à l'utilisation du même signe ou d'un signe similaire comme la dénomination sociale lorsque cette utilisation est, notamment, le fait d'un tiers de bonne foi utilisant son nom patronymique.(…) Justifie dès lors légalement sa décision, la cour d'appel qui, rejette une action en contrefaçon de marque au motif que la mise en exergue de son patronyme dans la dénomination sociale de son entreprise par une personne qui exerce, en qualité de gérant, des fonctions de contrôle et de direction et s'identifie ainsi à son entreprise, ce dont il résulte l'absence de mauvaise foi de la société et de son gérant n'est pas critiquable ».

(9) Cour de cassation, Chambre commerciale, 22 juin 2022, n°20-19.025, Affaire TAITTINGER

(10) Cour de cassation, Chambre commerciale financière et économique, 7 Septembre 2022 – n° 21-12.602

(11) Paris, 1 Ch., sect. B, 10 juillet 1986 ; Helmut Rothschild et autres c. consorts de Rothschild

(12) CA Paris, 5, 2, 30-06-2017, n° 16/14737 : la cour d'appel de Paris, par un arrêt en date du 30 juin 2017, annule pour les services de la classe 36 l'enregistrement de la marque "Plaza immobilier", déposée par Stéphane Plaza, pour atteinte à une dénomination sociale antérieure exploitée par une société par actions simplifiée (SAS) "Plaza Immobilier" exerçant une activité de promotion immobilière.

(13) Décision d’opposition INPI OPP 13-3367 31/01/2014 : L’opposition est reconnue et justifiée et la demande d’enregistrement est annulée au motif de l’antériorité. Les héritiers d’une même famille ne peuvent pas utiliser leur propre nom de famille à titre de marque si celui-ci a déjà été déposé pour des produits ou services similaires.

(14) Cour de cassation, Chambre commerciale, du 12 mars 1985, 84-17.163, Affaire Bordas : Le patronyme qui est inséré dans les statuts d’une société signé par la personne physique porteur de ce patronyme devient un signe distinctif qui se détache de la personne physique qui le porte pour s’appliquer à la personne morale qui l’exploite.

(15) Cour de cassation, Chambre Commerciale, 31 janvier 2006, affaire n°05-10116, Affaire Ines de La FRESSANGE

(16)  En ce sens, voir les jurisprudences Elizabeth Emanuel (CJCE 30 mars 2006, aff. C-259/04) et)

(17) Cour de cassation, Chambre commerciale 28 févr. 2024, FS-B, n° 22-23.833, Castelbajac