En vue du déconfinement prochain, outre les « fiches conseils métiers » éditées par le Ministère du Travail et les guides publiés par les branches professionnelles, le Ministère du Travail a fait paraître le 3 mai 2020 le « Protocole National de Déconfinement pour les Entreprises pour assurer la santé et la sécurité des salariés » pour aider les salariés et les employeurs dans la mise en œuvre des mesures de protection contre le COVID-19 sur les lieux de travail.
Ce document, destiné à épauler les employeurs en vue de leur reprise d’activité, rappelle les mesures de prévention des risques professionnels à prioriser dans les entreprises. Pourtant, de manière plus générale, la démarche de reprise s’annonce lourde et périlleuse.
Le respect d’un principe général de prévention des risques professionnels
S’agissant des principes généraux de prévention devant conduire à toute poursuite ou reprise d’activité, qu’elle soit totale ou partielle, cela nécessite en amont une évaluation des risques professionnels au regard du risque de contamination par le coronavirus, et, comme le préconise le Ministère, une mise à jour du document unique d’évaluation des risques professionnels en tenant compte des risques tant physiques que psycho-sociaux, en incluant également le télétravail à domicile.
Ce sont bien l’évaluation des risques et les Principes Généraux de Prévention énoncés à l’article L 4121-2 du Code du travail qui déterminent le choix des mesures à prendre, et qui permet à l’employeur, en cas de recherche de responsabilité, de justifier de la pertinence de celles-ci.
S’agissant du covid-19, l’évaluation de ce risque infectieux doit notamment se faire comme en matière de risque biologique, soit de la manière édictée par l’article R.4424-3 du Code du travail.
Une mise en pratique lourde et périlleuse
Comme le rappelle le Ministère du Travail dans son document, la démarche doit conduire, par ordre de priorité :
- A éviter les risques d’exposition au virus ;
- A évaluer les risques qui ne peuvent être évités ;
- A privilégier les mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle.
En premier lieu, les mesures organisationnelles destinées à supprimer le risque sont à privilégier, avec notamment le maintien du télétravail, de nature à éviter le risque en supprimant les circonstances d’exposition, et qui doit être la règle chaque fois qu’il peut être mis en œuvre.
En second lieu, et lorsque le risque ne peut être évité, il faudra donc identifier la source de l’exposition au risque Covid-19 et mettre en place des mesures destinées à assurer le plus possible la protection de la santé et de la sécurité des salariés face à ce risque (mesures barrières et de distanciation physique, aménagement des horaires de travail et des temps de pause, règles de circulation dans l’entreprise et gestion des flux de personnes, rotation des équipes, fermeture de la cantine ou aménagement des horaires d’ouverture, processus de fabrication, adaptation de la productivité, organisation des opérations d'habillage et de déshabillage, nettoyage et aération des locaux, fourniture d’équipements de protection, campagne d’information et de formation des salariés, mesures à prendre en cas de contamination d'un salarié ou même de simple suspicion, etc.).
Inévitablement, ces mesures vont avoir des conséquences très concrètes sur l’organisation de l’entreprise et du travail des salariés, et donc sur les conditions de travail, que vous allez devoir anticiper et traiter (et sur un plan juridique également…).
Dans ce cadre, il vous faut a minima faire participer activement votre CSE en l’associant à l'évaluation des risques professionnels inhérents à l'épidémie de Covid-19, à le consulter sur la modification du DUER, et l’associer à la détermination des mesures prises permettant la reprise d’activité (ils peuvent par exemple vous transmettre leurs propres résultats d’évaluation des risques, au-delà des sujets devant donner lieu à une information et consultation obligatoires du CSE), outre les services de santé au travail.
Cette étape est particulièrement importante, notamment quant au contenu du DUER qui résultera de l’évaluation des risques.
L’individualisation de l’activité partielle
En outre, et si dans ce cadre, votre démarche de reprise d’activité s’effectue de manière progressive, la parution d’une nouvelle ordonnance datée du 22 avril dernier (n°2020-460) doit requérir votre vigilance particulière.
Qu’elle se traduise par une fermeture de tout ou partie de l’entreprise ou par une réduction de l’horaire de travail pratiqué, l’activité partielle était par nature une mesure collective, même si elle n’affectait pas forcément tous les salariés.
Vous pouvez désormais faire du sur-mesure, l’ordonnance ayant rendu possible l’individualisation de l’activité partielle pour permettre notamment les reprises d’activité progressives, mais à des conditions extrêmement restrictives…
Ainsi, il est désormais admis de :
- soit placer une partie seulement des salariés de l'entreprise, d'un établissement, d'un service ou d'un atelier, y compris ceux relevant de la même catégorie professionnelle, en position d'activité partielle ;
- soit appliquer à ces salariés une répartition différente des heures travaillées et non travaillées, lorsque cette individualisation est nécessaire pour assurer le maintien ou la reprise d'activité.
Néanmoins, pour pouvoir faire usage de ces formes d’activité partielle, un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, un accord de branche est nécessaire. En l’absence d’accord, un avis favorable du CSE permet à l’employeur d’y recourir ; en clair il a un droit de véto.