Déclaration d'informations GloBE et relevé de liquidation de l'impôt complémentaire
auteurs
Laurent Leclercq Avocat Directeur Associé
Ali Ait Abed Avocat
Actualité
27 février 2025

Déclaration d'informations GloBE et relevé de liquidation de l'impôt complémentaire

2.    Précisions sur le contenu de la déclaration d’informations GloBE 

(« DIG », en abrégé)

Le décret du 4 décembre 2024 précise que la déclaration d’informations doit être complétée en euros ou dans la monnaie utilisée dans les états financiers consolidés du groupe et doit comprendre les 5 états suivants :

Les différents états et nature des informations dans la déclaration d'informations GloBE

1er état : informations générales
  • l’identification de l’entité déclarante
  • les informations générales sur le groupe
  • les informations comptables
  • la structure organisationnelle du groupe
  • l’identification des entités constitutives
  • l’identification des entités exclues du champ d’application
  • les changements intervenus dans la structure organisationnelle en cours de l’exercice
  • la synthèse des informations relatives à l’application de l’imposition minimale mondiale des groupes
     
2ème état faisant apparaître par Etat ou territoire
  • les informations portant sur les types de sous-groupes et leur identification
  • les informations nécessaires pour mettre en œuvre les mesures de sauvegarde (i.e. régime de protection fondé sur la déclaration qualifiée, régime de protection transitoire relatif à la RBII etc...)
     
3ème état faisant apparaître, par Etat ou territoire et pour chaque sous-groupe
  • les caractéristiques de l’Etat ou territoire qui comprennent l’identification des sous-groupes
  • le calcul du TEI
  • le calcul du résultat qualifié
  • le calcul du montant corrigé des impôts couverts
  • le montant corrigé d’impôts couverts négatif reporté en avant
  • les éléments pour la mise en œuvre du mécanisme de répartition de l’impôt dû au titre d’un régime fiscal agrégé des sociétés étrangères contrôlées
  • les calculs relatifs à la comptabilisation d’impôts différés
  • les éléments relatifs aux règles transitoires liées à l’entrée dans le régime
  • les options applicables au titre de l’Etat ou du territoire
  • les éléments pour l’application d’un régime éligible d’imposition des distributions
     
4ème état faisant apparaître pour chaque entité ou, le cas échéant, de manière agrégée pour chaque groupe fiscal
  • l’option pour le dispositif transitoire de déclaration simplifiée
  • l’option pour l’établissement d’une déclaration agrégée pour les entités membres d’un groupe intégré ou d’une réglementation étrangère équivalente si certaines conditions sont remplies
  • le résultat qualifié de l’entité
  • la répartition du résultat net comptable entre le siège et un établissement stable ou d’une entité interposée
  • les éléments nécessaires à l’application des corrections transfrontalières
  • les réductions du résultat net qualifié de l’entité mère ultime
  • les éléments nécessaires au calcul du montant corrigé des impôts couverts
  • les éléments pour la détermination de l’exclusion du résultat provenant de l’exploitation de navires en trafic international
  • les éléments pour l’option de la méthode de distribution imposable
  • les entités dont les états financiers sont élaborés à partir d’une norme comptable différente de celle utilisée pour l’établissement des états financiers consolidés de l’entité mère ultime
     
5ème état faisant apparaître par Etat ou territoire et pour chaque sous-groupe
  • les éléments nécessaires au calcul de  l’impôt complémentaire (i.e. taux de l’impôt complémentaire etc…)
  • les éléments nécessaires au calcul de la déduction fondée sur la substance
  • l’impôt complémentaire additionnel
  • l’impôt national complémentaire qualifié
  • l’allocation et l’attribution de l’impôt complémentaire
  • le total de l’impôt complémentaire dû au titre de la RBII au titre de l’Etat ou du territoire considéré
     

3.    Dispositif transitoire de déclaration simplifiée

Le décret prévoit la possibilité d’opter pour un dispositif transitoire de déclaration simplifiée lorsque les deux conditions suivantes sont remplies :

  • l’exercice concerné par l’option a été ouvert au plus tard le 31 décembre 2028 et clos au plus tard le 30 juin 2030 ;
  • aucun impôt complémentaire nécessitant une répartition entre entités constitutives n’est dû par le groupe d’entreprises multinationales ou groupe national dans l’Etat ou territoire concerné.


Le décret fait référence au régime de protection (temporaire à ce stade, prévu pour trois exercices en principe, mais qui pourrait être pérennisé à terme) prévu par l’article 223 VZ bis du CGI qui offre la possibilité de réputer nul l’impôt complémentaire exigible au titre de Pilier 2 si certains tests basés sur les données issues du CBCR qualifié sont respectés (la déclaration de résultats, pour ce qui concerne les groupes nationaux d’envergure). 
Cette option permet de bénéficier d’un allégement très substantiel des informations à fournir dans le 4ème état évoqué ci-dessus et donc de la charge administrative liée au respect de la règlementation dont tous les groupes se plaignent. Pour bénéficier de ce dispositif, il est impératif de pouvoir justifier que le CBCR est qualifié au sens des commentaires de l’OCDE (pp. 290 et suivantes des commentaires consolidés à décembre 2023), ce qui amène les groupes à revoir en profondeur et prioritairement leur process CBCR et à préparer leur CBCR sur la base des données des comptes consolidés.
On notera cependant que selon l’article 46 quater-0 ZZE de l’annexe III au CGI, à côté des informations nécessaires à l’application du régime de protection, il doit être mentionné pour chaque entité constitutive des informations chiffrées spécifiques qui relativisent un peu l’allègement déclaratif espéré au vu de la rédaction du texte de loi.
 

4.    Relevé de l’impôt de liquidation complémentaire

Aux termes de l’article 1679 decies du CGI, l’impôt complémentaire dû en France peut être :

  • l’impôt dû en France au titre de la RIR par la tête de groupe (l’entité mère du groupe, au sens de la règlementation Pilier 2), qui sera le plus souvent amputé des impôts complémentaires locaux (ceux qu’on appelle QDMTT) prévus la règlementation Pilier locale dont relèvent les filiales étrangères ;
  • l’impôt dû au titre de la RBII par les entités constitutives françaises redevables (c’est le cas par exemple pour les entités filiales directes ou via une holding française d’une entité mère étrangère établie dans un pays qui n’a pas transposé la règlementation Pilier 2) ;
  • l’impôt national complémentaire dû par l’entité redevable française (c’est le cas par exemple d’une filiale française insuffisamment imposée détenue par une entité mère allemande relevant de Pilier 2).


Le relevé de liquidation, s’il y a un impôt à payer, est produit en principe par chaque entité constitutive française redevable mais le dernier alinéa du I de l’article 1679 decies du CGI permet que soit désignée l’une des entités constitutives redevables françaises pour acquitter la totalité de l’impôt dû en France soit au titre de la RBII soit au titre de l’impôt national complémentaire. On peut s’attendre à ce que ce choix soit fait pour les groupes fiscalement intégrés qui sont déjà organisés de faon à centraliser chez la société intégrante les impôts dus par les sociétés membres. Même si l’entité payeuse n’agit qu’en tant que mandataire pour le paiement de cet impôt, elle peut être solidairement tenue des sanctions ou frais encourus en cas de paiement tardif ou insuffisant (cf. art. 53 de la loi de finances pour 2025, récemment adoptée). Il convient donc de bien prévoir les obligations des parties concernées dans un contrat en bonne et due forme. 
Des précisions sont également apportées par le décret sur les informations à produire dans le relevé de liquidation de l’impôt complémentaire. Ainsi, en plus des informations générales portant sur l’entité constitutive elle-même ou l’entité désignée pour le dépôt de la déclaration d’informations GloBE, le relevé doit contenir les informations suivantes relatives à l’impôt complémentaire dû:

  • le montant dû au titre de la RIR ;
  • le montant dû au titre de la RBII correspondant à la somme des montants de RBII dus par chaque entité française redevable ;
  • l’impôt complémentaire national dû pour chaque entité et la somme de ces impôts ;


Le relevé devra être daté et signé par la partie versante. Les entités qui ne sont pas redevables de l’impôt complémentaire au titre d’un exercice ou qui ont désigné une autre entité du groupe pour acquitter cet impôt à leur place sont dispensées du dépôt du relevé de liquidation. On peut penser que lorsque la tête de groupe est établie en France, c’est elle qui centralisera le dépôt du relevé de liquidation.

En pratique, voici quelques questions fréquemment posées et la réponse que nous suggérons. Chaque cas de figure doit toutefois être analysé soigneusement par l’entreprise, le cas échéant avec ses conseils, car la règlementation est souvent obscure et n’a pas encore fait l’objet de commentaires officiels de la part de l’administration fiscale à l’heure où nous écrivons ces lignes.

À quelle échéance la déclaration d’informations GloBE doit-elle être déposée ?

Compte tenu des textes applicables, la première échéance est le 30 juin 2026 pour le premier exercice d’application des règles Pilier 2, qu’on appelle le premier exercice de transition. Pour le deuxième exercice et les suivants, l’échéance est de 15 mois à compter de la clôture de l’exercice. 

Qui doit déposer cette DIG ?

En principe, chaque entité constitutive doit préparer une DIG la concernant. Mais le texte français (art. 223 WW bis du CGI) prévoit des assouplissements que la totalité des groupes, sans doute, vont exploiter. A titre d’exemple, l’entité tête de groupe peut déposer la DIG d’une filiale française en même temps qu’elle dépose celle d’autres filiales, en fonction de la législation applicable à ces filiales. On peut aussi imaginer que les déclarations concernant toutes les sociétés membres d’un groupe fiscal intégré soient déposées par la mère intégrante mais attention ! si cette dernière n’est pas la tête du groupe relevant de Pilier 2, il faudra qu’elle soit aussi désignée comme entité déclarante par les autres filiales françaises ne faisant pas partie du groupe fiscal. Il est donc crucial que le groupe et ses entités constitutives soient bien au clair sur « qui dépose quoi » et que les administrations concernées soient informées, par exemple via la déclaration de résultats (c’est le cas pour la France). 

Qu’entend-on par sous-groupe ?

La règlementation Pilier 2 vise explicitement les sous-groupes à détention minoritaire (article 223 WF du CGI) qui, tout en faisant partie d’un groupe plus large relevant dans son ensemble de Pilier 2, n’est détenu qu’à moins de 30%, directement ou indirectement par l’entité mère ultime tout en étant consolidé par intégration globale dans les comptes que prépare cette dernière. C’est le cas par exemple de sous-groupes dont le capital est très éparpillé avec un actionnaire qui se trouve en situation de contrôle malgré la faiblesse relative de sa participation (cascades de holdings). Ces sous-groupes doivent être identifiés spécifiquement dans le périmètre car ils sont traités comme distincts des autres entités du groupe Pilier 2 présentes dans la même juridiction mais dont le capital est, par exemple, détenu à 100% par la mère ultime. L’idée est de ne pas « polluer » les données de chacun des sous-groupes. L’article 46 quater-0 ZZA de l’annexe III au CGI définit comme sous-groupe chaque ensemble d'entités situées dans un même État ou territoire pour lequel la loi prévoit une détermination distincte du taux effectif d'imposition, ce qui est plus large que les seuls sous-groupes à détention minoritaire. Cela vise aussi, par exemple, les co-entreprises, au sens de la règlementation, les entités apatrides ou les entités d’investissement dans certains cas.

Quelles sont les décisions clés à prendre au niveau du groupe ou de l’entité avant de préparer sa déclaration ?

Par expérience, et en résumé, il est nécessaire pour le groupe concerné (i) d’avoir recensé de façon complète les entités du périmètre, leur régime fiscal, leur qualification au regard de la règlementation, leur catégorisation par sous-groupe, (ii) d’avoir une idée la plus claire possible sur les juridictions qui vont bénéficier des mesures de sauvegarde temporaires (cf. ci-après) vs. celles qui en seront probablement privées, (iii) de savoir comment obtenir les données dont on a besoin car beaucoup de ces données ne sont pas directement accessibles dans les comptes consolidés, (iv) de pouvoir apprécier l’intérêt de telle ou telle option prévue par la règlementation (la plupart de ces options sont prévues par entité ou par groupes d’entités voire par juridiction). 
La dernière version de la DIG publiée par l’OCDE recense les options suivantes (d’après les model rules) qui, pour certaines, doivent être prises lors de la première déclaration (e.g. option pour la perte GloBE simplifiée). Il faut ensuite organiser la répartition des rôles au sein du groupe étant souligné que si l’initiation du projet est souvent très centralisée, la production de la donnée à déclarer est très souvent décentralisée au niveau de chaque juridiction compte tenu de l’existence, fréquente, d’un impôt national complémentaire local. On remarquera que la règlementation ne prévoit pas l’obligation de déposer une DIG pour les besoins de cet impôt local mais en pratique, il est nécessaire d’en préparer une pour justifier le calcul de l’impôt à payer (ou pas).

Quel est le moyen le plus simple de produire cette déclaration ?

L’idéal pour une entité constitutive donnée est de pouvoir indiquer dans sa DIG qu’elle bénéficie de l’un des tests reposant sur le CBCR qualifié, sachant que ces tests sont en général (mais la règlementation prévoit des exceptions, par exemple pour les co-entreprises) appréciés au niveau de la juridiction, en faisant masse de toutes les entités constitutives qui s’y trouvent. Pour cela, il faut opter pour le dispositif transitoire de déclaration simplifiée.

Est-il nécessaire de disposer d’un outil spécifique pour  produire cette déclaration ?

En théorie, les calculs nécessaires peuvent être faits sur un fichier Excel…avec toutes les limites que cela peut avoir. Des outils de « marché » existent déjà et sont régulièrement mis à jour et complétés, des outils « maison » se développement également. Il appartient à chaque groupe de choisir la solution qui lui convient le mieux. Un tel outil peut être précieux pour l’aide au calcul, la documentation, la traçabilité, la simulation de scénarii…Mais il nécessite que beaucoup de travail soit réalisé en amont et le temps presse de plus en plus.

Quelles sont les sanctions prévues si cet imprimé n’est pas déposé ou mal rempli ?

L’article 1729 F bis du CGI dispose que sont passibles d’une amende d’un montant de 100.000 € en cas de défaut ou de retard de dépôt de la déclaration ou du relevé de liquidation. L’amende ne peut excéder 50.000 € par déclaration pour l’ensemble des autres manquements aux obligations déclaratives prévues à l’article 223 WW du CGI, par exemple le dépôt d’une DIG incomplète ou erronée. Ce dispositif encourage à la production d’une DIG reprenant si possible l’ensemble des entités constitutives du groupe (DIG centralisée) car laisser à chaque entité constitutive le soin de déposer sa propre DIG l’exposerait aux sanctions indiquées ci-dessus qui pourraient s’appliquer plusieurs fois au sein du groupe. Le II de l’article 1729 F bis du CGI prévoit toutefois un plafonnement des amendes forfaitaires encourues à 1 M€ au titre d’un exercice donné.