Depuis quelque temps, des start-up viennent bousculer le marché immobilier en « ubérisant » le secteur. L’une d’entre elles, qui se moquait des syndics de copropriété, a été condamnée en début d’année à la suite de plaintes déposées par différents organismes de professionnels de l’immobilier. Voici l’occasion de faire le point sur la notion de dénigrement en matière de publicité.
En publiant son classement de syndics de copropriété, une start-up vient d’entraîner une levée de boucliers chez certains professionnels de l’immobilier. Ceux-ci considèrent qu’elle poursuit l’action en dénigrement qu’elle avait entamée il y a deux ans. En effet, dès le mois de mars 2020, la start-up avait lancé une campagne publicitaire se moquant des syndics, fustigeant leurs délais de réponse et leur prétendue incapacité à gérer les demandes des copropriétaires.
Attaquée pour concurrence déloyale
Le 24 janvier 2022, la start-up est condamnée à verser plusieurs dizaines de milliers d’euros à plusieurs parties demanderesses représentant les syndics de copropriété. En effet, la start-up est reconnue coupable de concurrence déloyale sous forme de dénigrement par sa campagne publicitaire « merci syndic… », son #Mercisyndic et le jeu organisé sur le site mercisyndics.com et coupable de pratiques commerciales déloyales et trompeuses envers ces professionnels.
En outre, les parties demanderesses attaquaient la start-up sur un autre point : elle aurait laissé planer une certaine ambiguïté dans ses publicités, laissant penser qu’elle pouvait avoir le statut de syndic de copropriété, alors qu’elle « ambitionne de permettre aux copropriétaires de gérer eux-mêmes leur immeuble sans devoir passer par un syndic professionnel, au moyen d’outils et d’une équipe qu’elle met à leur disposition ». Le Tribunal, par cette ambiguïté, a considéré que la start-up tentait d’installer l’idée qu’il existe une identité de nature et de fonctions entre elle et un syndic de professionnel ; la start-up a donc été condamnée pour pratique commerciale trompeuse et déloyale susceptible d’induire en erreur le consommateur.
Le Tribunal de Commerce de Paris a cependant considéré que la start-up ne s’était pas rendue coupable de publicité comparative et d’exercice illégal de la profession de syndic. Sur ce dernier point, les demanderesses ne comptent pas en rester là et espèrent pouvoir faire condamner la start-up au moyen d’une nouvelle plainte.
Attention au dénigrement dans la publicité
Dans ses attendus, le Tribunal rappelle que « le dénigrement consiste à jeter le discrédit sur les produits ou services de la victime, indépendamment du caractère avéré ou non des critiques formulées ; enfin il doit bien évidemment être public ».
Il ajoute que pour être constitué, le dénigrement doit viser les produits ou services d’une personne ou d’un collectif identifié ou identifiable. Ce qui fut le cas dans cette affaire, car le nom des concurrents « quoique détourné est reconnaissable et le logo reproduit quasi à l’identique » en particulier sur le jeu proposé sur le site mercisyndics.com. Le ton ironique ou humoristique de la campagne n’a pas été retenu comme circonstance atténuante par le Tribunal de Commerce, notamment à cause de son caractère « fortement péjoratif et dévalorisant » et que les déclarations visent à présenter les syndics professionnels comme inefficaces, onéreux et indisponibles ce qui aggrave le discrédit.
Ce qu’il faut retenir :
- Le dénigrement consiste à jeter publiquement le discrédit sur les produits ou services d’une personne physique ou morale.
- Le dénigrement n’est avéré que si la personne est clairement identifiée ou identifiable, même grossièrement (nom ou logo détourné par exemple).
- Le dénigrement doit être public.
- La parodie, l’ironie ou l’humour ne peuvent justifier le dénigrement d’un concurrent.
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