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Refus du locataire d’acquitter les loyers : pas d’exception d’inexécution possible sans autorisation judiciaire de consigner

25 octobre 2017
par Pierre-Laurent Vidal

(Civ. 3e, 5 octobre 2017, n° 16-19.614, inédit)
Aux termes d’un arrêt rendu le 5 octobre 2017, la Cour de cassation rappelle que le locataire, qui estime le logement non « décent » au sens du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002, ne peut suspendre unilatéralement le paiement des loyers, en se prévalant de l’exception d’inexécution du contrat bail au motif que « nul ne peut se faire justice à soi-même ».

En l’espèce, des locataires, qui se plaignaient de désordres affectant le logement et les empêchant d’en jouir paisiblement, avaient suspendu le paiement de leurs loyers.

La bailleresse leur avait fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail, auquel ces derniers avaient fait opposition en demandant la condamnation du bailleur à effectuer des travaux et l’autorisation de consigner les loyers.

Par arrêt du 4 février 2016, la cour d’appel de Paris avait rejeté la demande des locataires et les avait condamnés au paiement de leur dette locative avec intérêt au taux légal.

Les preneurs avaient alors formé un pourvoi en cassation en reprochant aux seconds juges de n’avoir pas recherché, ainsi qu’ils y étaient invités, s’ils pouvaient ou non se prévaloir de l’exception d’inexécution pour s’opposer au paiement des loyers, compte tenu notamment des constats d’huissier versés aux débats révélant l’état du logement.

La Cour de cassation rejette le pourvoi en retenant que « la cour d’appel, qui n’était pas tenue de s’expliquer sur les éléments de preuve qu’elle décidait d’écarter et qui n’était pas tenue de procéder à une recherche que ses constations rendaient inopérante, en a souverainement déduit que M. et Mme Y… ne pouvaient opposer au bailleur l’exception d’inexécution ».

Ce faisant, et même à supposer qu’un locataire justifie de ce que le logement loué n’est pas décent, au sens de sens du décret du 30 janvier 2002, il ne peut pour autant décider unilatéralement de suspendre le paiement des loyers, sans risquer la résiliation du bail à ses torts exclusifs.

De la même manière, le locataire n’est pas davantage fondé à consigner le montant des loyers entre les mains d’un tiers, sans autorisation judiciaire préalable ; une telle consignation ne valant pas paiement.

Il sera rappelé que le preneur ne peut invoquer l’exception d’inexécution du bailleur dans son obligation de délivrance d'un logement décent pour être exonéré de son obligation de paiement du loyer en l'absence d'impossibilité totale d'utiliser les lieux loués, le paiement du loyer étant fondé sur la mise à disposition du logement et non sur sa jouissance (CA Nîmes, 9 février 2017, JurisData n° 2017-009277), sauf pour lui à rapporter la preuve du caractère « totalement inhabitable des lieux » (CA Montpellier, 17 janvier 2017, JurisData n° 2017-001746).

Tel ne semblait pas être le cas en l’espèce puisque les locataires n’alléguaient que des désordres affectant les lieux loués, leur interdisant « une pleine jouissance paisible ».

 

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