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Procédures négociées : l’Autorité de la Concurrence publie un projet de communiqué relatif à la procédure de transaction

11 avril 2018
par Marie-Louise Hyvernaud,
Frédéric Puel

A la suite de l’entrée en vigueur de la loi Macron (n° 2015-990 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques), la procédure de non-contestation des griefs a laissé place à la procédure de transaction. Pour rappel, la transaction permet aux entreprises qui ne contestent pas les pratiques qui leur sont reprochées, de se voir appliquer une sanction pécuniaire comprise dans une fourchette proposée par le rapporteur général de l’Autorité de la concurrence. Cette dernière a publié, le 8 mars, un projet de communiqué afin de clarifier les conditions de mise en œuvre de la procédure.

L’Autorité laisse l’initiative de la procédure aux sociétés qui pourront présenter leur demande de transaction au rapporteur général, qui reste libre ou non de lui donner une suite favorable et fait, le cas échéant, une proposition de fourchette de sanction à l’entreprise. Si la société accepte, l’accord est consigné dans un procès-verbal strictement confidentiel contenant la déclaration de non-contestation des griefs et la proposition de transaction. Il faudra que la déclaration de non-contestation des griefs soit complète, inconditionnelle, claire et sans ambiguïté quant à la réalité des faits, leur qualification juridique, ou leur imputabilité. Les sociétés pourront toutefois présenter des observations susceptibles d’être prises en compte par le Collège de l’Autorité de la concurrence dans sa détermination du montant de la sanction.

A ce stade, différentes remarques nous semblent devoir être faites sur la procédure de transaction explicitée par l’Autorité dans son projet de communiqué mis en consultation publique.

Il convient en premier lieu de saluer l’arrivée de la transaction, compte tenu du progrès qu’elle représente par rapport à la procédure de non-contestation des griefs qui présentait comme difficulté majeure la négociation longue et fastidieuse, avec les services d’instruction, d’un pourcentage de réduction d’une sanction dont le nominal était par la suite défini par le Collège. Ce système n’offrait que peu de prévisibilité aux entreprises

Dans la procédure de transaction, la négociation avec les services d’instruction porte directement sur une fourchette de sanction. Si le message est beaucoup plus clair pour les entreprises, la question de la façon dont les plancher et plafond de cette fourchette sont calculés demeure.

Le texte soumis à consultation indique en effet que si les principes de détermination des sanctions pécuniaires dont s’inspire le communiqué du 16 mai 2011 de l’Autorité « peuvent constituer un point de référence pertinent lorsque s’engage la discussion entre le rapporteur général et les entreprises en vue de la signature du procès-verbal de transaction », en revanche, « la méthode de détermination des sanctions décrite dans ce communiqué n’a pas vocation à être mise en œuvre dans la décision du collège ». Cette absence de précision sur le mode de calcul de la sanction constitue un véritable retour en arrière en matière de prévisibilité pour les entreprises.

En outre, la nouvelle procédure, au contraire de la précédente, ne laisse, apparemment, aucune place utile aux engagements que pourraient proposer les entreprises. Si l’Autorité mentionne bien la possibilité pour les entreprises d’en présenter dans le cadre de la procédure de transaction, elle indique simplement que leur capacité à réduire les risques anticoncurrentiels sera appréciée par le rapporteur général puis par le Collège, sans aucune autre précision sur l’impact de ces engagements sur l’amende qui sera in fine prononcée. Cette discrétion sur les engagements dans le projet de communiqué, lu en parallèle avec le paragraphe 464 de la décision 17-D-20 « revêtements de sols résilients », peut dès lors faire craindre un amenuisement du rôle de régulateur de l’Autorité.

Paradoxalement, en ce qui concerne la procédure d’engagements, l’Autorité a déjà su s’accorder plus de libertés, comme en témoigne le communiqué de presse du 7 mars dernier dans l’affaire John Deere (les entreprises en cause ont proposé des engagements et, de manière tout à fait inédite, le communiqué de presse mentionne que les services d’instruction ont accepté les engagements des entreprises et ont ainsi clos la procédure sans séance devant le Collège).

Au-delà de ces points d’analyse, d’autres éléments ne sont pas précisés dans le communiqué de procédure.

Alors que la procédure de non-contestation des griefs permettait de bénéficier d’un plafond d’amende diminué de moitié (soit 5% du CA mondial HT), la rédaction actuelle de l’article L.464-2 III du Code de commerce ne le précise plus.

Par ailleurs, il semble ressortir des premières négociations avec les services d’instruction de l’Autorité dans le cadre de procédures de transaction, que ceux-ci s’opposent à des procédures hybrides. Cette prise de position de principe nous semble diminuer l’attrait de cette procédure, en particulier lorsque de nombreuses entreprises sont impliquées. Il est facile de comprendre que le caractère hybride de la procédure la rend peu intéressante pour l’Autorité en termes de gestion du temps. Il reste que l’Autorité doit exercer pleinement son rôle de régulateur et l’acceptation de procédures hybrides, avec des engagements potentiellement forts, y participe pleinement.

Il faut espérer que la consultation publique actuellement en cours permettra à l’Autorité de corriger ou de préciser ces éléments.

 

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