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FONDS DE DOTATION & PERSONNES PUBLIQUES : ENJEUX JURIDIQUES

03 mars 2021
par José-Manuel Oliveira,
Stéphane Couchoux

Dans un contexte de restrictions budgétaires et de tarissement des subsides publics, les personnes publiques (État, collectivités territoriales, établissements, …) se tournent vers le mécénat qui constitue un moyen de financer leurs actions nationales ou locales d’intérêt général à caractère social, environnemental, éducatif, sportif, culturel ou patrimonial, …

Au plan fiscal, la collectivité peut organiser sa collecte de fonds privés en « régie directe » ou, pour des raisons juridiques et stratégiques, par l’intermédiaire d’un fonds de dotation (FDD) qui lui est exclusivement dédié.

Le FDD est la forme de « fondation », personne morale de droit privé, largement plébiscitée par les porteurs de projet car il est simple à créer et à organiser. Cependant, si le FDD est initié par une personne publique, des aspects juridiques doivent être anticipés.

Tout d’abord, comment s’articule sur plan strictement juridique la cohabitation du mécénat porté ou non par un FDD avec les règles encadrant les marchés publics ?

Par principe, par son caractère onéreux (selon les dispositions de de l’article L1111-1 du Code de la Commande Publique : un marché est un contrat conclu par un ou des acheteurs publics pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services, en contrepartie d'un prix ou de tout équivalent), un marché public se distingue d’une opération de mécénat conclue quant à elle à titre gratuit et sans contrepartie significative. Ceci étant, il peut surgir un risque de requalification de la relation juridique entre l’entreprise mécène et la collectivité lorsqu’une prestation du mécène est partiellement fournie au moyen de mécénat technologique ou encore, lorsqu’il a également la qualité de prestataire ou de fournisseur pour la collectivité. En effet, une opération de mécénat en nature, sortant en principe du champ de la commande publique, risque d’être considérée comme une prestation et assimilée à un détournement irrégulier d’un marché public.

De plus, la question des contreparties (visibilité, avantages et contre-prestations) qui peuvent être accordées par la personne publique, directement ou via son FDD, au mécène doit être maitrisée pour éviter la requalification de l’opération de mécénat en marché. Des précautions doivent donc impérativement être prises préalablement pour se prémunir de tout risque juridique et fiscal. En pratique et en cas de cumule de prestations et de mécénat, la conduite des opérations en deux phases distinctes est primordiale pour éviter tout risque au regard des règles de la Commande Publique. La convention de mécénat devra encadrer ces contreparties (nature, évaluation, barème, …) pour s’assurer que qu’elles ne confèrent pas un caractère onéreux à l’opération (marché public).

Autre sujet concernant l’hypothèse où un FDD est initié et contrôlé par la collectivité à travers notamment le choix de sa gouvernance ou de sa finalité (reversement des dons collectés par le fonds à la collectivité). Cette hypothèse peut emporter la qualification de pouvoir adjudicateur et soumettre les contrats conclus par le FDD à la Commande publique.

Enfin, bien que personne privée, un FDD créé sur l’initiative d’une collectivité n’est pas à l’abri du risque de gestion de fait de fonds publics. Cette notion renvoie au maniement, sans avoir la qualité de comptable public, de fonds ayant la nature de deniers publics. Le « comptable de fait » s’expose alors à des sanctions administratives et financières. Afin de pallier ce risque, la collectivité doit se montrer attentive quant à la finalité donnée à son FDD. Son objet doit être déterminé avec soin afin d’éviter que les fonds perçus dans le cadre du mécénat soient affectés exclusivement à des projets menés par la collectivité publique.

En conclusion, la mise en place d’un FDD par une personne publique s’inscrit dans un choix stratégique pertinent au plan juridique, mais requiert une anticipation accrue des risques juridiques :

  • Soit en (re)travaillant la gouvernance voire la finalité même du FDD ;
  • Soit en soumettant le FDD au respect d’une part, des règles du droit de la Commande (une contrainte juridique supplémentaire certes, mais tout à fait «gérable» en pratique) et, d’autre part, de la comptabilité publique à travers notamment le recours à la technique comptable du contrat de mandat (de recettes et de dépenses).

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