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Conditions d’éligibilité au CIR des dépenses de R&D engagées par les prestataires agrées pour leur propre compte

08 septembre 2021
par Sophie Joalland

Le Conseil d’Etat a apporté récemment des précisions utiles sur les modalités de calcul de l’assiette du Crédit d’Impôt Recherche (CIR), dont peut bénéficier un sous-traitant agréé à raison des dépenses de recherche engagées pour son propre compte.

Selon la jurisprudence (CE 5 mars 2018, n°416836, Lunalogic), un prestataire agréé n’est pas autorisé à inclure dans l’assiette de son CIR les dépenses exposées pour la réalisation d’opérations de recherche qui lui sont confiées par une entreprise donneuse d’ordre soumise à l’impôt sur les sociétés, y compris lorsque cette dernière n’aurait pas pris en compte ces dépenses pour le calcul de son propre CIR (que les dépenses de sous-traitance soient plafonnées pour la détermination du CIR ou que le donneur d’ordre renoncerait à les retenir dans sa base de calcul). Plus récemment, le Conseil d’Etat (CE 09 septembre 2020, n°44023, Takima) est venu préciser que le Code Général des Impôts se borne uniquement à interdire aux organismes de recherche privés agréés d'inclure dans la base de calcul de leur propre CIR les dépenses exposées pour réaliser des opérations de recherche pour le compte de tiers et non les sommes reçues à ce titre, ayant pour effet de mettre fin aux effets pervers du mécanisme dit du « CIR négatif » pour les sous-traitants agréés.

Par ailleurs, une Cour d’Appel (CAA de Versailles, 22 janvier 2019, n°17VE01717) avait considéré qu’un organisme de recherche sous-traitant chargé de réaliser des prestations, qui ne portent pas contractuellement sur la réalisation d'opérations de R&D, expose lui-même, à cette occasion et pour son propre compte, des dépenses de recherche éligibles au CIR, sous réserve de remplir les 3 conditions suivantes :

  • ces dépenses de recherche doivent être nettement individualisées des prestations faisant l'objet du contrat de sous-traitance ;
  • il doit en assumer la charge financière sans la répercuter intégralement au donneur d'ordre en cause ; et
  • il doit conserver la propriété et donc l'usage des résultats pour sa propre activité.

Cette décision n’ayant pas fait l’objet d’un pourvoi, cette méthode d’analyse n’avait pas eu l’occasion d’être confirmée, ni infirmée par le Conseil d’Etat.

Par une récente décision (CE 18 juin 2021, n°433319, Sté Sopra Steria Group), le Conseil d’Etat a retenu une position plus libérale et est venu écarter la condition relative à l’absence de répercussion de la charge financière sur le donneur d’ordre. Le Conseil d’Etat juge que les dépenses de recherche engagées par un organisme de recherche privé agréé pour son propre compte peuvent être incluses dans la base de calcul de son propre CIR, y compris lorsque ces dépenses ont été suscitées par l'exécution de prestations pour le compte d'un tiers dont l’objet ne porte pas sur la réalisation d'opérations de recherche. Les sommes facturées au donneur d’ordre au titre des prestations rendues, qui ne constituent pas des dépenses éligibles pour ce dernier, n’ont pas à être déduites de l’assiette du CIR de l’organisme sous-traitant.

Bien que la position du Conseil d’Etat puisse paraître à première vue contraire à la logique incitative du CIR, elle n’en reste pas moins conforme aux termes-mêmes de l’article 244 quater B du CGI, qui ne conditionnent pas le bénéfice du dispositif à l’absence de répercussion des sommes à un éventuel cocontractant.

Cette décision remet toutefois au centre le concept de « dépenses confiées » retenu par le Code Général des Impôts et duquel résulte l’obligation pour le prestataire agréé de déduire de son CIR les dépenses objet d’une facturation au donneur d’ordre.

Si cet arrêt est synonyme d’opportunités pour les prestataires privés agréés CIR, il requiert toutefois qu’une attention particulière soit portée à la rédaction des contrats de sous-traitance conclus avec l’entreprise donneuse d’ordre (tant au regard de la mission confiée que de la propriété des droits) et surtout à la typologie des justifications qui pourront être apportées par l’entreprise agréée sur la nature réelle des prestations fournies.

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