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Concurrence : la Commission européenne met en place un système d’alertes anonymes pour les particuliers

03 avril 2017
par Frédéric Puel,
Laurent François-Martin

La Commission européenne a lancé, le 16 mars dernier, un système de messagerie cryptée permettant aux particuliers de dénoncer, éventuellement de façon anonyme, les pratiques anticoncurrentielles dont ils ont connaissance. Il est probable que l'Autorité de la concurrence suivra l'initiative de la Commission. En effet, les procédures européennes et nationales sont proches et la France a mis en place les mêmes outils que la Commission, comme en témoigne l'introduction en France de la procédure de clémence. En outre, les systèmes de lanceurs d'alerte sont très en vogue et l’on assiste au développement, dans les entreprises, d’outils de « whistleblowing », facultatifs en matière de concurrence mais rendus obligatoire en matière de corruption (loi Sapin II) pour les entreprises d’une certaine taille.

  1. Fonctionnement du nouveau système

Cette messagerie, gérée par un prestataire externe permet de relayer à la Commission des messages sans transmettre les métadonnées permettant l’identification de la personne ayant fourni les renseignements. Ce système donne également la possibilité d’un dialogue anonyme avec les services de la Commission.

  1. Utilité du nouveau système : anonymat et dénonciation de tous types d’infraction

Ce système renforce les dispositifs existants de mise à jour de pratiques anticoncurrentielles (plainte, enquête de secteur, clémence). Outre le fait que la dénonciation pourra être totalement anonyme, il vise tout type d’infraction, notamment les infractions verticales auxquelles s’intéressent de plus en plus les autorités de concurrence que le système de clémence, ouvert aux entreprises, ne permet pas de dénoncer. La dénonciation peut ainsi être totalement anonyme et concerner tous types d’infractions, y-compris verticales.

  1. Utilisation du nouveau système : des particuliers ou des entreprises ?

La Commission indique que le nouveau système est ouvert aux particuliers. Il n’est pas interdit de penser que la Commission devra trier parmi les alertes qui lui seront adressées dénonçant de véritables infractions et celles motivées par des raisons moins justifiées. On peut imaginer également que l’alerte pouvant être totalement anonyme, le véritable lanceur d’alerte pourra parfois ne pas être un particulier mais une entreprise désireuse de de dénoncer certaines pratiques de ses concurrents, clients ou fournisseurs … en souhaitant n’être ni plaignante, ni clémencière pour préserver sa relation commerciale.

Néanmoins, la Commission, exige jusqu’à présent plus qu’une simple déclaration pour lancer une enquête avec un standard de preuve très élevé. Il paraît illusoire d’imaginer qu’une simple déclaration anonyme par un lanceur d’alerte suffise pour que la Commission ouvre une procédure. Il faudra donc que les particuliers disposent de preuves sérieuses.

  1. Quelles conséquences les entreprises doivent-elles tirer de ce nouveau dispositif ?

La Commission fait peser une pression « éthique » plus forte sur les opérateurs économiques pour qu’ils se penchent sur leur niveau de conformité aux règles de concurrence. L’Autorité de la concurrence a publié un document-cadre en matière de programmes de conformité (février 2012) et la Commission une brochure « Compliance Matters » (novembre 2011). Ces deux documents donnent des orientations précises pour permettre aux entreprises et aux fédérations de mettre en place des programmes de conformité efficaces.

On sait qu’au niveau européen, la clémence, à l’origine d’environ 80% des dossiers, est sensée créer l’inquiétude des entreprises participant à un cartel. Dans un contexte global de réflexion sur les lanceurs d’alerte, on peut imaginer que ce nouveau dispositif va contribuer à alimenter cette crainte des entreprises.

  1. En pratique, que doivent faire les acteurs économiques ?

Pour encadrer ces risques, une démarche de conformité se décline en plusieurs étapes :

  • Audit et diagnostic des pratiques avec mesure du risque ;
  • Déploiement d’un programme de mise en conformité ; (modifications comportementales et contractuelles, formation, process internes, lanceur d’alerte interne …)
  • Mise en place d’une démarche encadrant un risque d’inspection des autorités de contrôle

Il est sans doute temps pour les entreprises qui n’ont pas encore fait le nécessaire, d’initier une telle démarche.

 

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