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Précisions sur l’articulation entre consultation ponctuelle et consultation récurrente du CSE sur les orientations stratégiques

September 29, 2022

La question est d’importance et peut faire trembler les employeurs : un projet faisant l’objet d’une consultation ponctuelle peut-il être suspendu tant que la consultation récurrente sur les orientations stratégiques s’y référant n’a pas eu lieu ?

Plus précisément, lorsqu’une entreprise consulte le CSE dans le cadre d’un projet de modification de l’organisation économique ou juridique ou en cas de restructuration et de compression des effectifs, doit-elle avoir, au préalable, consulté le CSE dans le cadre de la consultation récurrente sur les orientations stratégiques ?

C’est à cette question que la chambre sociale a répondu dans un arrêt du 21 septembre dernier (Cass.soc., 21 sept. 2022, n° 20-23.660). Dans cette affaire, le CSE d’un lycée professionnel est consulté dans le cadre d’un projet de fermeture du lycée professionnel et de résiliation du contrat d’association correspondant avec le ministère de l’agriculture ; en parallèle la consultation sur les orientations stratégiques n’a pas encore abouti.

Le CSE a alors demandé la suspension de la consultation sur la résiliation du contrat avec le ministère de l’agriculture jusqu’à la clôture de celle sur les orientations stratégiques.

Saisie de la question, la Cour de cassation, dans un attendu formulé en termes généraux retient, au visa des articles L. 2312-8, L. 2312-24 et L. 2312-37 du code du travail, que « la consultation ponctuelle sur la modification de l’organisation économique ou juridique de l’entreprise ou en cas de restructuration et de compression des effectifs n’est pas subordonnée au respect préalable par l’employeur de consulter le CSE sur les orientations stratégiques ».

  • Des consultations indépendantes

La cour d’appel, dans cette affaire, avait retenu la suspension de la consultation sur le projet tant que la consultation récurrente sur les orientations n’était pas close. En effet, elle estimait que la décision envisagée par l’école était un choix stratégique qui n’est qu’une déclinaison concrète d’une orientation stratégique devant, au préalable, être soumise au CSE. La chambre sociale retient, au contraire, qu’il s’agit de deux consultations indépendantes.

La consultation récurrente relative aux orientations stratégiques a pour objet de promouvoir l’anticipation et permettre au CSE de procéder à la définition des grandes lignes stratégiques de l’entreprise et à discuter sur l’avenir général de celle-ci. Elle doit avoir lieu, à défaut d’accord, au moins une fois par an (C.trav., art. L. 2312-22). Un accord peut modifier sa fréquence et elle peut devenir triennale (C.trav., art. L. 2312-19).

Comme le relève la notice explicative de la Cour de cassation, « par son objet et sa temporalité, cette consultation a été définie indépendamment des consultations ponctuelles ».

En effet, ces dernières relèvent d’un projet déterminé ayant des répercussions sur l’emploi, les conditions de travail…

Il s’agit donc de deux consultations indépendantes l’une de l’autre.

En outre, lier les consultations ponctuelles aux consultations récurrentes aurait, souvent, pour conséquence d’empêcher l’employeur de faire des projets qui n’auraient pas été envisagés, au préalable, un an voire deux ou trois ans auparavant alors même que la situation de l’entreprise est appelée à évoluer. Une telle position conduirait donc à un immobilisme préjudiciable à l’entreprise.

  • Vers un principe général ?

La chambre sociale avait déjà eu l’occasion de se prononcer sur une question similaire : le défaut de consultation annuelle du comité d’entreprise sur l’évolution des emplois et des compétences (C.trav., anc. art., L. 2323-56) avait-il une incidence sur la régularité de la consultation sur un projet de licenciement collectif ? La Cour de cassation avait déjà répondu que « la régularité de la consultation du comité d’entreprise sur un projet de licenciement économique n’est pas subordonnée au respect préalable par l’employeur de l’obligation de consulter le comité d’entreprise sur l’évolution annuelle des emplois et des qualifications (…) » (Cass.soc., 30 septembre 2009, n° 07-20.525).

La Cour ajoutait même que la régularité de la consultation sur le projet de licenciement n’est pas conditionnée non plus au respect de l’obligation de négocier sur la GPEC.

Au regard de cette jurisprudence antérieure et de la généralité des termes utilisés par la chambre sociale, il peut être retenu que la régularité de toute consultation ponctuelle n’est pas soumise au respect de la consultation récurrente pouvant s’y référer.

Notons, toutefois, que la Cour d’appel de Paris s’était déjà prononcée dans le même sens que la chambre sociale en ajoutant cependant une réserve liée à une dissimulation fautive de l’employeur d’une nouvelle stratégie impliquant une réorganisation, lors de la consultation sur les orientations stratégiques (CA Paris, 3 mai 2018, n° 17/09307). Cette réserve n’a pas été reprise par la chambre sociale mais ses décisions futures devront être suivies de près.

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